Au Cameroun, Nestlé ne donne pas le lait

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Dans son documentaire, Judith Rueff conte l’histoire d’un entrepreneur camerounais engagé, depuis plus de dix ans, dans un combat judiciaire contre Nestlé le géant suisse.

« Nous sommes des Camerounais, nous voulons nous battre pour que la croissance de notre pays soit une réalité. Pour que nos enfants aient des enfants au Cameroun. Vous trouvez normal que des enfants aillent mourir à Lampedusa, que le pape se déplace, qu’il pleure. Arrêtons de gérer les jérémiades, qu’on ne vienne pas démolir les usines que nous montons. » Dans son usine désaffectée de la banlieue de Douala, au Cameroun, Pius Bissek, le directeur de Codilait, raconte son combat contre le tout-puissant Nestlé, omniprésent en Afrique à travers ses cubes aromatiques, ses aliments pour bébé mais surtout son lait concentré sucré. L’homme autrefois à la tête d’une entreprise de production de lait concentré accuse Nestlé de concurrence déloyale.

Tout commence en 1994. A l’époque, la dévaluation du franc CFA met en difficulté les sociétés étrangères qui exportent vers le Cameroun. Mis en difficulté, Nestlé lance, l’année suivante, une nouvelle marque : Gloria. Par un étrange tour de passe-passe, ses boîtes sont vendues à des prix plus que compétitifs. Son concurrent local veut en avoir le cœur net. Pius Bissek fait alors analyser la nouvelle poudre de Nestlé au laboratoire de lutte anti-fraude. Résultat : « Ce n’est pas du lait », s’étrangle le directeur camerounais. Dans les boîtes de Gloria : des matières grasses végétales – huile de palme raffinée et huile de coco – mais de matière grasse laitière… point. En 2003, le directeur de Codilait se lance dans un marathon judiciaire qui se poursuit encore aujourd’hui. A travers son documentaire, Judith Rueff nous plonge au cœur de la stratégie offensive de Nestlé en Afrique, au prix de nombreux dommages collatéraux.

« Un empire en Afrique », de Judith Rueff, diffusé sur France 5, le mardi 29 avril à 21h45.