Afro Inspiration : Esther Diane Naah fondatrice de Mboa Urban Music

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Mboa Urban Music, nouveau portail en ligne de diffusion et de promotion de la musique urbaine camerounaise. Nous avons rencontré la fondatrice Esther Diane Naah pour en savoir plus.

Mboa Urban Music

Bonjour Esther, présente-toi rapidement pour nos lecteurs ?

Bonjour, je m’appelle Esther, j’ai 24 ans, jeune entrepreneuse et passionnĂ©e de musique, je suis spĂ©cialisĂ©e en marketing et communication. Je suis rentrĂ©e au Cameroun il y a bientĂŽt 2 ans et je suis l’initiatrice du projet Mboa Urban Music dont la plateforme sera en ligne dans quelques jours.

Parlons du projet Mboa Urban Music. Pourquoi penses-tu que la musique camerounaise a besoin d’une telle initiative ?

Depuis que je suis revenue au Cameroun, j’ai pu sortir, rencontrer du monde et dĂ©couvrir des artistes trĂšs talentueux que je n’avais jamais entendu nulle part avant ni en soirĂ©e, ni Ă  la radio, ni Ă  la tĂ©lĂ©vision et encore moins sur internet. De lĂ  est nĂ©e l’idĂ©e de Mboa Urban Music. Une plateforme qui diffuserait et ferait la promotion d’artistes bourrĂ©s de talent, et qui serait le pont entre ces derniers et un public en demande. Pour moi, le premier ennemi d’un artiste c’est l’anonymat, la musique urbaine camerounaise a besoin d’exposition, qu’on l’écoute et qu’on la consomme pour pouvoir prendre une autre dimension.

 

Il n’a pas Ă©tĂ© trop difficile de faire le saut d’amateur de musique Ă  entrepreneur en musique ?

Non pas du tout. La musique pour moi c’est avant tout une passion. À cette passion, je rajoute un dĂ©fi, celui de pouvoir faire consommer au maximum de personnes la musique urbaine Ă  la sauce camerounaise. Donc la motivation et la mission sont telles que la transition s’est faite tout Ă  fait naturellement.

Au fait, d’oĂč vient le nom « Mboa Urban Music ». Est-ce que Urban signifie que la musique traditionnelle ou d’autres genres n’auront pas leur place dans la plateforme ?

« Mboa Urban Music », la musique urbaine du pays tout simplement. C’est une association d’argot et d’anglais, le Camfranglais comme on l’appelle communĂ©ment. Ce choix avait pour objectif que tous les Camerounais se reconnaissent dans le nom et aient une idĂ©e du concept du projet sans mĂȘme avoir lu notre description.

Il est important de savoir que le propre de la musique urbaine est cette capacitĂ© de pouvoir mĂ©langer les genres musicaux et les influences, ce qui lui confĂšre une vraie richesse culturelle. Il sera donc tout Ă  fait possible de retrouver des styles musicaux autres que ceux que l’on a l’habitude d’entendre habituellement c’est-Ă -dire le rap, le reggae, soul, RnB.

Au-delà des titres, que va t’on retrouver sur la plateforme ? Parle-nous du mode de fonctionnement.

Sur la plateforme vous retrouvez des interviews, des critiques d’albums, de mixtapes, des Ă©missions en collaboration avec d’autres plateformes, une section « tĂ©lĂ©chargement » pour les mixtapes, compilations, album-concepts, EP des artistes. Il y aura Ă©galement un agenda pour les Ă©vents, des photos et vidĂ©os des Ă©vĂšnements que nous couvrirons. Nous travaillerons Ă  apporter du contenu intĂ©ressant et original de façon rĂ©guliĂšre.

En tant qu’observatrice privilĂ©giĂ©e, quelles tendances observes-tu dans la musique urbaine camerounaise ?

Les artistes prennent de plus en plus conscience de l’importance de la qualitĂ© de leurs produits autant du point de vue sonore que visuelle. Ils font en sorte de s’aligner sur les standards internationaux afin de rĂ©pondre aux besoins d’un public exigeant. Ils investissent de plus en plus de temps et d’énergie dans leur communication et leur image notamment Ă  travers une utilisation plus professionnelle des rĂ©seaux sociaux et autres plateformes en ligne. Ce qui permet d’attirer l’attention du public et de faciliter l’accĂšs Ă  leurs Ɠuvres. Les artistes commencent Ă  trouver un rythme et des sonoritĂ©s exportables parce que ceux-ci parlent Ă  tout le monde, quelle que soit la culture et au-delĂ  des frontiĂšres tout en gardant une identitĂ© camerounaise, Ă  l’image d’artistes tels que Museba ou Jovi. Les choses Ă©voluent et dans le bon sens. Il y a encore Ă©normĂ©ment de travail, il faut que chacun des maillons de la chaĂźne « mouille le maillot », les artistes, les Djs, les mĂ©dias traditionnels, les mĂ©dias en ligne, les promoteurs et le public camerounais lui-mĂȘme en tant que premier ambassadeur. J’espĂšre que d’ici quelques annĂ©es on Ă©coutera autant la musique de chez nous que l’on peut Ă©couter des artistes comme Fally Ipupa ou WizKid (j’espĂšre) et que cette tendance s’étendra au-delĂ  de nos frontiĂšres.

Vous avez choisi 14 trĂšs bons morceaux. Il n’a pas Ă©tĂ© trop difficile de convaincre les artistes de collaborer ?

À notre grande surprise, les artistes ont tout de suite soutenu l’initiative et apprĂ©ciĂ© l’idĂ©e. Ils ont tous donnĂ© leur accord et nous ont fait parvenir leurs morceaux. Et je profite de cette entrevue pour pouvoir leur dire un grand MERCI parce que c’est trĂšs encourageant. Un geste comme celui-lĂ  montre que tout le monde souhaite que les choses avancent et veut s’investir pour. Ils ont beau ĂȘtre, pour beaucoup d’entre eux, bourrĂ©s de talents et populaires, mais ils restent cependant suffisamment humbles et ouverts pour accepter de participer Ă  ce genre de projet et sans rien demander en retour. Pour eux j’espĂšre vraiment que cette opĂ©ration sera une rĂ©ussite et l’équipe mettra tout en Ɠuvre pour que ce soit le cas.

Certains artistes urbains sont issus de la « diaspora » camerounaise, faut-il avoir le passeport made in Cameroon pour apparaßtre sur les Mboa Tapes ou sont-ce plutÎt les artistes undergrounds que vous tentez de pousser ?

Tout artiste ayant un « ADN camerounais » qu’il soit issu de la diaspora ou pas peut apparaĂźtre sur les Mboa Tapes. Par exemple dans ce premier volume, vous retrouverez des artistes tels que Veeby ou Sifoor qui sont issus de la diaspora. Les Camerounais sont partout dans le monde, ce qui nous importe c’est le talent, la qualitĂ©, ce serait dommage de s’en priver tout simplement pour une question de frontiĂšre ou de passeport. D’autre part effectivement, soutenir les artistes underground fait partie des missions de la plateforme, mais nous ne souhaitons pas nous limiter Ă  l’underground.

Avez-vous voulu faire une compilation reprĂ©sentative de la musique camerounaise d’aujourd’hui ou bien vous vous ĂȘtes imposĂ© un thĂšme particulier ?

Nous voulions effectivement Ă  travers cette compilation faire ressortir ce qu’est la musique urbaine camerounaise d’aujourd’hui, une musique de qualitĂ© qui se consomme avec plaisir et que l’on partage avec fiertĂ©. Nous ne sommes pas partis d’un thĂšme, mais nous avons choisi des titres qui nous permettaient de faire passer le message exprimĂ© plus haut, d’oĂč le choix prĂ©cis de ces 14 titres et l’agencement de ceux-ci. Quand vous prendrez le temps de lire la tracklist, vous comprendrez oĂč je veux en venir.

Cet Ă©tĂ© se tient la seconde itĂ©ration de l’Afro punk Festival Ă  NYC, le but de l’initiative commencĂ©e l’annĂ©e derniĂšre est de promouvoir des artistes afros en dehors des genres musicaux oĂč on les attend, hip-hop, rnb, jazz. Penses-tu qu’un festival Rock ou Pop puisse exister au Cameroun aussi ?

Un festival Rock au Cameroun ? Nous ne sommes pas prĂȘts (rires). Afropop d’ici quelque temps ce sera possible. Mais au Cameroun, on Ă©coute trĂšs peu ce style de musique, il faut Ă©duquer l’oreille du consommateur. Il suffit d’aller dans les coins populaires pour comprendre que c’est Bikutsi, Ndombolo, couper dĂ©caler, Afrobeats, hip hop US. Par contre, nous en sommes encore au niveau de promouvoir le Hip-hop, R’n’B, Jazz, AfroSoul made in Cameroon. Nous avons besoin de plus d’évĂšnements dans ce sens, il en existe que trĂšs peu. Quand on voit le monde qui remplit le Palais des Sports de YaoundĂ© pour une initiative comme le Concert K.O. Palu qui Ă©tait un concert de musique urbaine, on voit qu’il y a un besoin rĂ©el dans ce domaine.

À l’instar de la musique urbaine anglaise trĂšs imprĂ©gnĂ©e des sonoritĂ©s dubstep et riddim jamaĂŻcains, tu dirais que la plus grosse influence au niveau de l’urban musique 237 serait quoi ?

Dans la musique urbaine made in Cameroon, deux tendances se dĂ©gagent. D’une part on a des artistes axĂ©s afro, qui utiliseront des percussions, du djembĂ©, du balafon, des instruments et des rythmes typiquement africains et d’autre part, on a des artistes qui ont une influence beaucoup plus « urban music » qui eux utiliseront des instruments et une production plus digitale (des synthĂ©tiseurs, des boĂźtes Ă  rythmes, des programmations) avec des mĂ©lodies proches de la pop. Et ceci de plus en plus, mĂȘme dans le Bikutsi. Ce mĂ©lange des genres me fait croire trĂšs fort que la musique camerounaise telle qu’elle est faite aujourd’hui peut s’exporter, se consommer et se vendre autant que la musique des pays autour de nous.

AprÚs la 1ere compilation. Quelle est la suite pour Mboa Urban Music ?

Donner une vie Ă  la compilation offline, hors internet. Nous allons faire en sorte de la faire passer en radio, de la rendre accessible aux Djs de la place. Il y aura d’autres volumes de la compilation. Nous pensons Ă  associer aux Mboa Tapes des soirĂ©es avec des reprĂ©sentations live, des showcases, nous y travaillons. D’autres projets sont dĂ©jĂ  dans le four, nous vous en tiendrons informĂ©s assez rapidement.

Et pourquoi pas un label (rires) ?

Ce n’est pas facile (rires). Je dois avouer qu’en parallĂšle de la plateforme, je travaille avec un artiste local en tant que Artist & Repertoire Manager. Je m’occupe principalement de lui donner une direction artistique, lui apporter des conseils en communication et en gestion de son image ainsi que de son dĂ©veloppement en tant qu’artiste. Un label, on y pense, qui sait peut-ĂȘtre dans quelques annĂ©es, mais ce sont des projets qu’on n’improvise pas. L’objectif pour l’instant est d’amener Mboa Urban Music le plus loin possible, le reste viendra plus tard.

Un mot sur le logo ! On aime beaucoup. Pouvez-vous nous parler du processus créatif ?

Merci beaucoup. Le logo est une crĂ©ation de l’agence « Dots Labs » de Jean Louis Ntang qui est planneur digital spĂ©cialiste du branding et stratĂ©gie de dĂ©veloppement, avec lequel j’ai la chance de pouvoir travailler. Je leur ai prĂ©sentĂ© le concept de la plateforme, notre direction, notre mission, nos objectifs et ils m’ont rĂ©alisĂ© ce logo au design trĂšs Ă©purĂ© et Ă©lĂ©gant qui rĂ©pond Ă  notre exigence de qualitĂ© dans la gestion de notre image de marque.

Si je vous dis Afro Inspiration tu me réponds ?

TINA : This Is New Africa. L’Afrique c’est l’avenir il y a tout Ă  faire. Et je suis trĂšs fiĂšre d’ĂȘtre issue de ce beau continent.

Un dernier mot pour les lecteurs d’Afrokanlife ?

Merci beaucoup de m’avoir lu jusqu’au bout. J’espĂšre que vous comprendrez le but de notre initiative et soutiendrez le projet notamment en tĂ©lĂ©chargeant et en partageant la compilation Mboa Tape qui sera disponible sur Afrokanlife, et ce le plus possible. Nous vous invitons par la mĂȘme occasion Ă  joindre la conversation et partager vos impressions sur Twitter avec l’hashtag #Mboatape.

Merci pour cette entrevue !

Merci Ă  vous pour l’intĂ©rĂȘt portĂ© Ă  Mboa Urban Music. Nous en avons besoin pour avancer.


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