Django Unchained, sûrement un des blockbusters de l’année dernière, aura fait couler beaucoup d’encre tellement le contexte historique et le mélange des genres peut prêter à confusion.
Le film de Quentin Tarantino raconte l’histoire d’un esclave, Django (Jaimie Foxx), vendu séparément de sa femme Brunhilde par les frères Speck. Ces derniers vont croiser le Dr. King Schultz (Christoph Waltz), ce qui résultera d’ailleurs en une malheureuse rencontre pour les frères. Surtout c’est la libération de Django en échange de services au bon Dr. King Schultz. Leur aventure peut démarrer les menant à terme à libérer l’épouse de Django (Kerry Washington).
Voilà à peu près pour les grandes lignes du film que j’ai d’ailleurs eu bien du mal à décrire tant je ne veux gâcher à personne le plaisir de l’histoire au cinéma. (Lire
Maintenant le cinéphile que je suis ne pouvait se contenter de subir son “divertissement” et de ressortir avec une dévotion pour Tarantino entièrement renouvelée. Ne vous y trompez pas, c’est bel et bien le cas ici tellement j’avais été déçu par Inglorious Basterds. Le succès du film tient selon moi plus à son casting qu’aux dialogues.
Avec Django Unchained nous avons eu à nouveau la preuve que Tarantino est un génie de l’écriture et du cinéma tout simplement. Ce film propose plusieurs grilles de lecture de la place de l’homme noir dans la société américaine. Si Spike Lee en avait été le réalisateur, je n’aurais pas été surpris tant l’excercice requiert d’être “dans la peau du sujet” si vous me permettez l’image afin d’en saisir les subtilités.
Commençons par Django, personnage passionné, sans pitié et un peu ridicule au travers duquel Quentin Tarantino fait une critique de l’aliénation des noirs ou plutôt la manifestation de celle-ci. Lorsque Schultz permet à Django une fois libre, de choisir lui-même ses propres vêtements que fait-il ? Ce qu’il fait immédiatement c’est de choisir les vêtements les plus fancy qu’il a vu un blanc porter, d’une couleur extrêmement flashy et ce en dépit du ridicule qu’il inspire.
Alors j’imagine en toute humilité que ce qui est montré ici, c’est le fait de l’aliénation des Noirs qui, une fois dans une position sociale un peu plus élevée qu’avant, immédiatement reproduisent certaines habitudes de ceux/celui qui les dominaient.
Entre les années 70 jusqu’à aujourd’hui, on constate encore que beaucoup d’afro-américains repoussent les limites du ridicule par rapport à leur style vestimentaire toujours plus ostentatoire. Qu’on ait les ambitions d’une icône mode ou pas, les vêtements souvent des vestiges d’une époque et sont censé être des indicateurs de richesses ou de l’élévation sociale de l’individu.
La seconde critique s’il en est de l’homme Noir apparait au moment où Django rencontre d’autres esclaves. Django est confronté à deux choses. La manière dont il est perçu par les autres esclaves en tant qu’homme noir libre et la manière dont il est perçu par les blancs.
A ce moment-là donc un des esclaves n’arrête pas de lui lancer des sales regards, on sent qu’il le jalouse parce qu’il est habillé “comme un blanc”, et parce que c’est le seul noir qu’il ait vu qui monte à cheval. Plutôt que de se réjouir de l’accès de Django à une position sociale plus élevée, où il est libre, l’autre esclave se contente de le jalouser et d’éprouver du ressentiment envers Django, tant et si bien que celui-ci est obligé de le menacer de le frapper et de l’insulter pour que cessent les regards et les mots.
La troisième critique du noir aux USA est illustrée par l’apparition de Stephen (Samuel L. Jackson) sur l’écran. En effet celui-ci est l’archétype même qui à intériorisé sa condition d’esclave. Second du maître de la plantation, il est un peu l’équivalent esclave du Capo des camps. Faisant de l’excès de zèle quant à la discipline de ses congénères esclaves, il entretient une relation très particulière avec le propriétaire de la plantation Calvin J. Candie (Léonardo Di Caprio).
Cette relation ambigue entre Stephen et Calvin J. Candie rappelle dans sa forme la dialectique du maître et de l’esclave de Hegel ou le second transforme sa condition d’esclave en se libérant de celle-ci à travers le travail. Rien d’aussi profond ou compliqué dans Django Unchained, mais on peut se poser la question de qui est réellement assujetti à l’autre ? Est-ce Stephen dont la place dans la société est conditionnée par sa naissance, ou Calvin J. Candie qui est dépendant de son “valet” autant pour la gestion de sa plantation que pour son business de vente d’esclaves. La scène dans la bibliothèque de la plantation où Stephen assis boit son verre et fait la moral à son propriétaire en est la meilleure illustration.
Pour terminer je dirais que j’ai été vraiment très surpris qu’une partie de “l’intelligencia” afro-américaine avec à sa tête Spike Lee, se soit insurgée contre ce film, les uns disant qu’il bafoue la mémoire des Noirs, les autres qu’il est raciste. Je me pose la question de comment ces nouveaux puritains réagiraient s’ils se voyaient offrir un ticket pour voir le magnifique “Amistad” de Spielberg sorti en 1998. Là oui il s’agit d’un film sur l’esclavage, et là oui le film est dur (pas assez même) et dénué d’humour car contrairement à Django Unchained le but est moins de se divertir.
Allez voir Django Unchained, faites-vous votre propre opinion et partagez la avec nous dans la partie commentaire, je serai ravi de discuter du film avec les lecteurs d’afrokan.
Django Unchained – Official Trailer (HD)
Cet article a été rédigé par DILLMATIC du blog DILLMATIC.
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