Pour commencer, regardez le reportage Faut pas rêver – Destination Cameroun.
Mes impressions ? Ce reportage est MAGNIFIQUE !
Je l’ai regardé en faisant fi des invectives lancées par des amis et des connaissances à moi. Mais je vais vous dire ce qui m’a marqué. Je fus touchée par la joie de vivre, toujours louée des Camerounais. Malgré les conditions de vie et de travail difficiles, ils sont forts, ils sont combatifs, ils m’inspirent. Ce sont « monsieur et madame tout le monde ». Je redécouvre à quel point mon pays va mal. Il va tellement mal qu’à chaque problème que le documentaire exposait, je voyais un moyen de s’enrichir, de se développer, d’évoluer, je voyais une astuce pour promouvoir, aider, etc. Et pourtant rien ou presque n’est fait dans ce sens. Je découvre un Cameroun abandonné par ses dirigeants. Je comprends pourquoi la politique intéresse peu, il faut vivre, et militer c’est fatigant et cela ne n’aide pas dans la vie de tous les jours. Je découvre un pays TRÈS RICHE, mais exploité au profit de l’oligarchie accompagnée de ses collaborateurs extérieurs. Je découvre un Cameroun authentique, dont 85 % de l’économie vient de l’agriculture. Je découvre la beauté des traditions ancestrales, ses mystères, ses richesses. J’ai redécouvert la réalité du pays. Je dis redécouvrir parce que j’avais oublié que c’est essentiel de voir ou de se souvenir de ce que peuvent vivre les autres quand on ne manque pas de certaines choses. Eh oui, mes amis, il ne faut pas rêver ! C’est exactement ce que vivent beaucoup de nos frères tous les jours.
Cependant, je n’ai pas du tout aimé la partie sur la « sapologie ». Je ne me reconnais pas dans ce genre de choses que je trouve réducteur et abrutissant. J’ai trouvé cela non avenue et insultant pour la majorité des Camerounais qui ont pour préoccupations principales se nourrir, se vêtir, se loger, avoir une source de revenus permettant de se payer tout ce qui précède, et jouir de ses libertés.
Plus loin encore, je comprends ce qui a dérangé. C’est le fait que le vécu quotidien, au Cameroun, de la majorité des Camerounais résidant en France et ailleurs, n’est pas celui présenté par la journaliste de France3. Oui, nous sommes la génération des climatiseurs, d’internet, du paraitre, des groupes électrogènes, des grandes maisons, et ci et ça. Mais croyez moi, nous ne sommes pas si nombreux à avoir eu la chance d’être nés de parents aisés, qui ne manquent pas de l’essentiel, ou qui sont tout simplement riches, ouverts au monde. 40 % de notre population vit en deçà du seuil de pauvreté. Dans d’autres pays, lorsqu’on approche les 10 % tout le monde crie. Mais au Cameroun c’est juste normal. Arrêtons de nous voiler la face. Le Cameroun se développe petit à petit, mais en attendant, il y en a pas mal qui vivent dans les conditions du documentaire. Vous vous êtes demandé pourquoi on ne montre pas les immeubles, les boulevards, les parcs, et tout ce qui est beau. Pour commencer, on ne peut pas montrer tout le Cameroun dans un reportage d’un peu moins de deux heures. Ensuite, pourquoi critiquez-vous toujours ce qu’autrui fait si vous n’êtes pas fichus de faire le travail de fond qu’un étranger accomplit à votre place ? J’ai fait ce commentaire avant même d’avoir vu le documentaire : « Tant que les lions n’auront pas leurs propres historiens, les histoires de chasse continueront de glorifier le chasseur. Proverbe africain. » Si vous n’êtes pas contents, faites vos documentaires ! Si vous n’êtes pas heureux, montrez au monde la « belle image » que vous pensez être celle qui résumerait ce qu’est notre beau pays le Cameroun !
Je ne suis pas en train de déclarer que mon pays n’est composé que de chasseurs et de personnes vivant de la culture des champs. Mais ce n’est pas vraiment le Cameroun que celui des intellectuels qui insultent plus que ne proposent des solutions. Ce n’est pas le Cameroun que celui des riches, dont les enfants voyagent souvent, puis reviennent à peine un mois pour souffrir des coupures d’eau et de courant tout juste. Ce n’est pas le Cameroun que celui de la beauté des immeubles et des maisons des quartiers résidentiels. Mes chers compatriotes, arrêtons de nous mentir. Nous sommes certes parmi les peuples d’Afrique les plus instruits, mais nous sommes aussi parmi ceux qui émigrent le plus. Oui, nous brillons fort ! Nous brillons ailleurs qu’au Cameroun. Combien ont le courage de rentrer se confronter aux difficultés du pays ? Combien se sont demandé ce qui pouvait bien se passer en dehors de son quartier ou dans un village qui n’est pas le sien ? À un moment il faut arrêter avec les simagrées et l’hypocrisie. Cessons l’ignorance. Ce reportage m’a appris des choses que je ne savais pas, et je suis sure que vous aussi en avez appris beaucoup. Et ce sont des choses vraies, même si elles ne sont pas aussi répandues que nous pourrions le percevoir. Et, tant que la majorité ne jouit pas de la richesse que nous offre notre pays, je considère que non, le Cameroun n’est pas un pays où tout est magnifique !
Cependant oui, le Cameroun est un pays qui veut sortir du gouffre. Les jeunes se tournent de plus en plus vers l’entrepreneuriat, s’intéressent un peu plus à l’actualité, aux opportunités créatrices d’emploi et donc de pouvoir d’achat. Notre pays veut changer. Mais il ne fait que régresser sur le plan politique pour ne citer que cela. L’adoption du récent code électoral signe le retour en arrière de notre pays. En réalité, nous ne sommes pas sortis de l’auberge. Comme je l’ai dit dans un ancien article, impliquez-vous. Vous avez une force insoupçonnée : internet. Récemment, il s’est tenu une conférence sur l’influence digitale des jeunes Africains. Cette présentation devrait vous éclairer sur le sujet : http://bantupolitics.blogspot.fr/2012/04/la-micro-influence-digitale-des-jeunes_16.html.
Il serait peut-être temps de nous demander comment écrire notre histoire au lieu d’attendre que ce soit toujours l’étranger qui nous montre la paille dans nos yeux ou nous dévoile la beauté silencieuse de ce qui est à nous.
J.E.M.
Cet article a été rédigé par Jasmine EMENE du blog : http://jasemene.wordpress.com/
Bio de Jasmine : I’m a neutro. Don’t worry, be happy. Sois opportuniste n’attends pas la chance, prends la. Pas l’temps d’naisier!
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