Free Angela and all political prisoners, parcours d’une éternelle militante
Que l’on soit d’accord ou pas avec les prises de position politique d’Angela Davis, on ne peut en revanche qu’admirer le parcours de cette éternelle militante qui a tant lutté pour la situation de la femme, des noirs américains, et des prisonniers politiques.
Le film documentaire Free Angela and all political prisoners, en salle depuis le 3 avril, rappelle une période déterminante de la vie de cette figure emblématique du mouvement des droits civiques.
La réalisatrice Shola Lynch a accompli un coup de maître avec ce film, dont la création a nécessité pas moins de huit années. Enrichi de nombreuses images d’archive, des témoignages d’Angela Davis elle-même et de ses proches, le travail de Shola Lynch ne se veut pas un biopic, mais revient sur quatre années majeures dans le parcours de la militante : 1968 à 1972.
Bande-annonce du film de Shola Lynch.
Revenons sur cette triste période pour la liberté d’expression et l’égalité des droits aux États-Unis.
8 février 1968, lors d’une manifestation pour les droits civiques, trois étudiants trouvent la mort en Caroline du Sud. La même année, la jeune Angela Davis -alors âgée de 24 ans- rejoint le Che-Lumumba Club, une section du Parti communiste américain, mais aussi le mouvement révolutionnaire Black Panther dont elle restera toujours proche. Ces deux adhésions lui valent d’être surveillée par le FBI. Par ailleurs, c’est également à cette période qu’elle s’engage dans le combat féministe, elle-même victime du sexisme ambiant dans le milieu politique et militant.
En 1969, Angela Davis est nommée professeure de philosophie à l’Université de Los Angeles, mais elle est rapidement renvoyée à cause de son activisme politique. Investie dans le comité de soutien des frères Soledad, elle est la coupable idéale lorsqu’il s’agit de trouver les instigateurs de la prise d’otage lors du procès de ces deux activistes du Black Panther Party. Accusée de complicité dans l’affaire, elle figure même sur la liste des 10 personnalités les plus recherchées du FBI.
Elle est incarcérée à New York où elle entame une grève de la faim puis en Californie, séjour en prison qui va durer seize mois au total. Déterminée à prouver son innocence, mais aussi à dénoncer les conditions de vie des détenu(e)s américain(e)s, en particulier des détenus afro-américains, Angela Davis parvient à médiatiser son histoire ce qui suscite un engouement mondial pour la jeune femme.
Le documentaire de Shola Lynch s’achève sur l’année 1972, année de tous les espoirs. En juin, Angela Davis est finalement acquittée. Elle se consacre alors à témoigner de la violence carcérale et de son racisme à travers de nombreux ouvrages. Devenue directrice du département des études féministes de l’Université de Californie, elle enseigne avec passion l’histoire de l’esclavage, les études afro-américaines et le Black Feminism.
Féministe, marxiste, militante des droits civiques, trois qualificatifs qui symbolisent certes le combat de toute une vie, mais qui sont néanmoins quelque peu réducteurs pour une femme de 69 ans qui est aujourd’hui plus que jamais sur tous les fronts, dans la lutte contre l’inégalité sous toutes ses formes, dans le combat pour plus de dignité et de liberté.
Shola Lynch nous livre donc un documentaire militant, qui démontre l’admiration de la réalisatrice pour la femme qu’elle dépeint, elle cherche d’ailleurs à entretenir la mémoire du combat pour les droits civiques dans les années 1960 : « J’ai voulu que Free Angela and all political prisoners soit aussi un témoignage pour les plus jeunes ».