La marque french teuch va s’arrêter. Voilà pourquoi.

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marque french teuch

Reproduction du texte de French Teuch marque à la vulgarité puante qu’on aimait beaucoup.


Difficile de savoir par où commencer pour expliquer les choses plus en détail. Probablement que la première question qui vous vient à l’esprit c’est « Pourquoi ? ».

Parce que ta mère m’a sucée trop fort.

Non, sérieux.

Plusieurs raisons, dont la première et principale raison est l’argent, au sens large. Les autres raisons ? Facebook, les soirées et les limites à notre direction artistrique.

Pour comprendre, un peu d’histoire.

french teuch est née en 2009, partant d’une grosse blagues entres potes, qui s’est transformée en vrai-faux projet. Pour être tout à fait honnête, on ne pensait pas vraiment faire de l’argent avec ça. C’était un doux rêve que de voir le truc exister en vrai, porté par nous et quelques potes. A l’époque, c’était justement une belle histoire entre potes. Pas réellement une entreprise, ça ressemblait plutôt à une association.
On rigolait à imaginer les tshirts les plus sales, on organisait des mini-soirées dans des bars à Paris et on a fait une petite vidéo où des gens buvaient du gros sperme. C’est de la que tout est parti, parce que la vidéo a eu un petit succès sur internet (c’était un peu avant l’époque où toute la terre faisait des vidéos pour buzzer mes couilles sa mère la pute). La vidéo n’avait aucun sens, la marque n’existait même pas, et nous n’avions rien à vendre !

Quelques mois plus tard est née (le 25 octobre 2010) la marque french teuch, via une petite boutique en ligne, avec 2 produits seulement : le tshirt TON CUL SALE PUTE et le tshirt DRINK IT EVERYDAY.
Vous n’imaginez pas le nombre de difficultés qu’on a connu pour lancer la marque. Entre un fabriquant qui décide de ne plus bosser avec nous la veille du lancement de la production parce qu’il a peur pour sa réputation (par rapport au concept vulgaire de la marque), ou encore la banque qui sécurise vos paiements par CB qui décide aussi de rompre le contrat une semaine après le lancement de la boutique en ligne, à cause, encore une fois, du concept provoc de la marque…
Ce qu’il faut savoir, c’est que, aussi bien le fabriquant que la banque, connaissaient parfaitement le concept vu qu’on leur avait présenté un dossier complet et qu’il y a eu une dizaine de rendez-vous et de négociations à chaque fois.

Et la fin de french teuch est aussi très liée à son commencement. Les racines du succès étaient simples : une bande de potes motivés, un projet honnête et entier (pas de pipo, pas de marketing de merde), une petite communauté de fans (principalement sur Facebook) qui a compris et kiffé la démarche, et des soirées.

1) Dès le début, on a eu une relation tumultueuse amour/haine avec Facebook.

A l’époque, toutes les marques, les artistes, les entreprises, les assos etc avaient un profil FB (voire plusieurs). french teuch avait un compte Facebook plein (5000 amis) et un 2ème compte (qui se remplissait vite de nouveaux amis). Puis il y a eu le grand ménage, quand FB a commencé à supprimer les comptes qui n’appartenaient pas à des personnes physiques. On avait donc crée une fan-page qui comptait aussi un peu plus de 5000 fans. A l’époque, c’était beaucoup, pour une petite marque parisienne. Surtout que l’activité sur les pages était importante. Il y avait de l’animation, même si les ventes étaient encore un peu faibles.
Et donc un jour, sans prévenir, les 2 profils french teuch (et donc les 7-8000 amis) disparaissent de FB. Sauf que la fan-page était administrée par un compte french teuch et disparait en même temps. Boum. Coup dur.
C’est une anecdote mais qui explique vraiment l’importance qu’a eue FB pour french teuch. A l’époque du lancement de french teuch, Facebook permettait vraiment à de petites marques ou de jeunes artistes de se faire connaitre, même sans argent, se montrer et de développer sa petite communauté de fans. C’était mortel. Et naïvement, on a tous plongés et dépensé beaucoup d’énergie la dedans (en même temps, il n’y avait pas d’alternative pour communiquer sans argent).

Aujourd’hui, et je pense que beaucoup d’artistes ou de petites marques pourront en témoigner, c’est plus difficile. Le reach des posts de fan-pages est tellement bas que même avec une communauté établie, les messages deviennent quasi invisibles sur FB. Pour ceux qui ne connaissent pas tout ça, ça veut dire que même si on met un message sur notre fan-page, elle n’apparaitra pas sur votre newsfeed. Facebook fait ça pour obliger les marques à payer pour diffuser leurs messages. Pour info, si on voulait que tous nos fans voient nos messages, il faudrait payer Facebook environ 150€ par post. Et pour une petite marque comme nous, c’est tout simplement impossible.

Petite parenthèse sur Twitter, où la communauté était plus petite mais super active et super « utile ». Le compte Twitter de french teuch a été créé et animé par une personne qui avait une compétence assez exceptionnelle dans ce domaine, et qui a énormément aidé la marque, en réunissant plein de twittos de divers horizons derrière la marque, des gens influents, actifs, qui ont grandement participés à la reconnaissance de la marque à Paris et en France.

Il faut savoir que pendant longtemps, près de 70% de nos ventes provenaient de gens qui cliquaient sur un lien mit sur Facebook. Aujourd’hui, c’est très proche de 0%.
C’est sans aucun doute la raison la plus importante qui explique la fin de la marque. Mais surement pas la seule.

2) La marque est née en soirées, est faite pour être portée en soirées, et pendant longtemps, les soirées étaient notre plus gros (et quasi-unique, en fait) moyen pour communiquer, et une manière de gagner de l’argent pour financer la marque.

C’est un des plus grands paradoxes de la marque. Les soirées étaient vitales pour la survie de la marque. C’était un moyen de faire connaitre la marque, directement au public concerné (des jeunes qui sortent, comme nous), en faisant des partenariats, en organisant nos soirées, en habillant des DJ’s… C’était aussi un moyen de financer la marque, en négociant des deals avec les clubs. On organisait les soirées et on prenait un petit pourcentage des recettes par exemple, ou on négociait pour le club achète nos canettes de Sperme pour les revendre pendant la soirée, et on installait un petit stand de vente de tshirts dans le club… C’était cool, ça fonctionnait pas mal et ça permettait de lancer les nouvelles collections.

Sauf que ça prenait un temps FOU. Et l’équation n’était pas gérable. Si on bossait bien sur les soirées, on n’avait pas le temps de bosser sur les collections. A un moment, il n’y avait plus rien qui sortait de nouveau, et on faisait trop de soirées. Sauf que si on arrêtait les soirées, on n’avait plus assez d’argent pour faire vivre la marque.
La marque fonctionnait bien, bien mieux que tout ce qu’on pouvait imaginer, mais on ne roulait pas sous les dollars, donc il fallait toujours faire gaffe et trouver des moyens de faire rentrer un peu de thunes pour faire vivre la marque. On ne gagnait clairement pas assez pour recruter plus de monde pour gérer les soirées et la marque. Et l’organisation de soirées est parfois tellement galère, dans un milieu rempli de gens pas très fiables…

A un moment, on s’est dit que french teuch restait avant tout une marque de vêtements, et on avait tellement d’idées à développer, qu’il fallait qu’on libère du temps. On a fait le pari de diminuer de plus en plus les soirées pour se focaliser sur la marque, en sachant qu’on perdait 50% de nos revenus…

3) L’argent et la motivation, les 2 nerfs de la guerre.

Quand t’as pas de fric, t’as besoin d’une motivation extrême, limite aveugle, pour faire des choses sans moyens. Et au début, il y avait de ça.

Je vous disais que la marque fonctionnait plutôt comme une asso que comme une entreprise. C’est-à-dire qu’il y avait une bande de gens motivés par le projet, et surtout, tous bénévoles.
Pendant longtemps, personne n’a pu vivre de la marque, personne ne gagnait de fric. Tout le monde donnait ses idées, participait à tout ce qu’on faisait (vidéos, développement du site internet, l’orga des soirées, le design des fringues, l’animation des comptes FB/Twitter…), et a même investi son argent, sans garantie de retour, et sans vraiment compter ses efforts. Sans eux, rien n’aurait été possible. Mais c’est logiquement que toute cette énergie du début ne pouvait pas durer éternellement. Les gens qui participaient étaient de plus en plus occupés dans leur vie perso ou pro et la marque n’a jamais eu la puissance financière pour rémunérer autant de monde. Et donc, paradoxalement encore, c’est quand la marque avait le moins d’argent qu’elle avait le plus de staff dans l’équipe.
Impossible aujourd’hui de lancer autant de projets en simultané (genre une vidéo + une soirée + une nouvelle collection) avec une équipe réduite.

4) La direction artistique.

Vaste sujet.
Dès le début, french teuch était une « marque de tshirts » mais nous, on a toujours voulu faire plus. C’est pour ça qu’il y a eu des sweats, des hoodies, polos, écharpes, et même des bijoux. Il y a eu aussi de nombreuses idées qui n’ont pas pu être développées (snapbacks, bonnets, chemises et même un trench coat… !).
Pourquoi pas ? Principalement une question d’argent, encore une fois.

Prenons l’exemple du trench. Un gros projet qui a été en développement pendant plus d’un an et qui finalement n’a jamais été fait. Le concept du trench était génial : un trench très classique en facade, classe, noir ou beige, façon Burberry. La touche french teuch se retrouvait dans la doublure : une doublure avec un motif de marinière, toujours très classe. Mais en s’approchant bien, on verrait que les bandes de la marinière serait en fait de la typographique à base des pires insultes possible. De la vulgarité hardcore et scred. L’insolence discrète. La classe vulgaire. La saloperie qui rencontre la sapologie.

Alors pourquoi le projet a été abandonné ?
Pour lancer ce trench, il fallait pas moins de 5 fournisseurs différents : un pour le tissu extérieur du trench, un autre pour le tissu de la doublure, un autre pour les boutons gravés du trench, encore un pour imprimer les rouleaux de tissu de la doublure, et un dernier pour faire le montage de tout ça pour finaliser le trench, tout ça dans 4 pays différents (France, Portugal, Turquie et Maroc). Et pour un cout de fabrication de 140€ par trench avec un minimum d’une centaine de pièces par couleurs (et encore).
Vous imaginez bien le prix de revente dans ces conditions, en comptant nos frais, les impôts et tout le bordel. Infaisable le délire. Pour que ce soit faisable, il aurait fallu produire de bien plus grandes quantités que celles de nos produits habituels, et ça aurait demandé un budget de départ beaucoup plus élevé.

Ca résume notre problématique en général. Pour pouvoir faire tout ce qu’on voulait artistiquement, il aurait fallu produire (et donc vendre) beaucoup plus. Et pour ça, il aurait fallu avoir de nombreux revendeurs. Et c’était chaud. Encore une fois, le concept de la marque faisait sa force et sa faiblesse. Les acheteurs de boutiques en général avaient un retour positif, aimaient la marque, mais trouvaient le concept trop chaud pour leur boutique. Je vous cite le directeur des achats d’une grande boutique hype à Paris : « Franchement ça défonce et je sais que ça cartonnerait si on mettait la marque en vente mais c’est chaud, on a des familles en boutiques, des parents qui accompagnent leurs gosses etc, on ne peut pas mettre des ‘sale pute’ et ‘sperme’ comme ça ». Ca les empêche pas de vendre des tshirts avec de la weed dessus ou des trucs du genre. Bref.

On aurait pu s’en passer, et c’est ce qu’on a fait, mais du coup on était condamné à ce que les produits se vendent TOUS très bien dans la boutique en ligne french teuch. Les ventes de chaque collection permettant de payer la suivante, et ainsi de suite. Sauf que ça n’a pas toujours marché. Si certains produits ont cartonnés, d’autres moins, et du coup il nous reste du stock de certains produits qui se vendent peu (ou trop lentement) et ça veut dire qu’il y a de l’argent qui est bloqué, qui ne peut pas être utilisé pour financer les collections suivantes.
Certains produits, sur lesquels on a beaucoup travaillé, dont on est fiers, et qui sont de haute qualité, se sont très peu vendus. Les hoodies, nos plus beaux produits, par exemple.
D’autres, comme les magnifiques colliers en or et argent se vendent peu ; ils sont justes trop beaux, mais probablement trop simples et trop chers.
De même que les sacs en toile, qu’on a mis un an à trouver (la majorité des sacs comme ça sont d’une qualité dégueulasse, et nous on voulait absolument en trouver des beaux et bien épais, on a été jusqu’en Thaïlande nous-mêmes pour les trouver et revenir avec des centaines de sacs dans nos valises, une dinguerie).
Tout ça représente des dizaines de milliers d’euros de stock dont l’argent aurait pu être utilisé pour développer le trench, les snapbacks etc.

C’est pour ça que depuis 1 an ou 2, on ne lance plus que des tshirts. Déjà il n’y a que ça qui se vend, et en plus c’est le seul produit qu’on a encore les moyens de développer. Alors forcément, c’est limité, et ça joue un peu sur notre motivation, de savoir qu’il y a des choses qu’on voudrait faire mais qu’on ne peut pas. Ou de voir que tout le travail pour sortir des produits d’exception résulte sur un flop (il suffit de voir l’article juste en dessous pour voir la masse de travail que représentaient les colliers).

Ok alors après avoir expliqué tout ça, quoi ? J’ai passé les 3 dernières heures à écrire ça et j’en arrive au bout en me demandant à quoi ça servait en fait. Ça s’arrête et même si c’est un grand changement et une grande tristesse pour nous, peut-être que tout le monde s’en fout ?
Moi-même j’en aurais probablement rien à foutre qu’une marque untelle ou truc s’arrête. Après tout, french teuch a bien vécu. On pensait faire ça 6 mois pour déconner et ça a duré plus de 5 ans. C’est déjà incroyable.

En plus je réalise que le message à l’air quand même assez badant non ? Limite ça donne l’impression qu’on a le seum, contre Facebook, contre le système, voire même contre vous ? Pourtant c’est pas du tout le cas. Bien sûr, c’est bizarre de voir une telle aventure s’arrêter mais on est tellement reconnaissant, surtout envers vous.

Ces quelques années ont étés géniales et c’est grâce à vous. Si french teuch a existé pendant si longtemps, ce n’est pas pour rien. Ce n’est pas grâce à notre talent incroyable, ni à la grande qualité de notre sperme, riche en vitamines et sels minéraux, c’est grâce à vous, grâce à toi.
Si tu lis ce message, si t’en es venu à bout, si t’as suivi la marque, porté la marque, vanté la marque à tes amis peut-être, participé aux délires sur FB/Twitter, alors tu es french teuch. Sans toi, rien de tout ça n’aurait été possible, alors du fond du cul, un grand merci.
L’avantage d’avoir Facebook qui nous nique notre communication, c’est qu’au moins on est surs que si tu es là à lire ce message, tu es un vrai. Un vrai FDP, comme on les aime.

On va s’arrêter la déjà. On verra si ça vous fait réagir et on sera pour discuter si vous voulez. On ne sait pas trop quelle va être la suite, comment ça va s’arrêter exactement. On verra et on vous tiendra au courant. Il y aura encore une occasion de vous remercier proprement.


Site web : http://www.frenchteuch.com/

Facebook : https://www.facebook.com/lafrenchteuch