Montreal, 21h42. Cela fait pres de 8h que j’ai comme des millions d’internautes visionné la capsule virale sur le ”maintenant” très populaire Kony, ce mercenaire et rebelle ougandais responsable des pires atrocités dans son pays.
J’y ai appris qu’il était un homme sous le coup de plusieurs mandats d’arrêts internationaux pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité, viols… Apres avoir regardé le clip du début la fin, j’ai été , certainement comme tous ceux qui l’ont vu ébranlée. D’abord par le fait que moi, une africaine, j’ignorais ce massacre qui se perpétue depuis des décennies dans ce pays pas très loin du mien. Ensuite, j’ai été émue par l’histoire de ce gentil américain, père de famille ordinaire qui sèche les larmes de Jacob la victime ougandaise. Mon premier réflexe a été de vouloir diffuser encore plus le clip pour faire le plus de bruit et sensibiliser le plus de monde. Mais un ami a attiré mon attention sur d’autres sources et m’a conseillé de me renseigner sur l’organisation Invisible Children avant de prendre position de façon claire.
Et c’est de la que part ma frustration. Nous sommes tous tellement dans la spirale de l’instantané, du sensationnel , du ‘partage virtuel’ que l’on en oublie souvent les réflexes élémentaires : toujours remettre en question une information. Dans le cas de Invisible Children, de sérieuses questions se posent quant au fonctionnement de leur organisation et leur interprétation des faits. De plus, selon leur plus farouche détracteur, Visible Children (http://visiblechildren.tumblr.com/) ils auraient exagéré et meme manipulé les faits pour atteindre leurs objectifs. Le plus choquant est que sur leur site on aperçoit les figures clés de l’organisation poser avec des fusils au milieu de soldats.
Personne ne questionne les intentions qui sont ma foi très louables. Personne ne niera jaimais que KONY est un criminel de guerre confirmé. Mais je m’interroge sur notre rôle. Facebook et Youtube ont fait de nous des observateurs acteurs, des passifs actifs qui d’un simple clic avons l’illusion de changer le monde. Je ne nie pas la force des réseaux sociaux , qui ont été d’une remarquable puissance lors des printemps arabes par exemple, mais souvent force est de reconnaitre que l’on suit plus une mode. Mon continent a connu des génocides , des guerres, des dictatures , la corruption et la pauvreté y sont présentes. Mais nous sommes aussi des entrepreneurs, des prix nobel, des artistes engagés , des acteurs du changement importants, des réussites sociales, des femmes et des hommes exemplaires. Mais la video qui devient virale est celle de Kony, criminel confirmé. Qui ici connaissait Mme Wangari Maathai, prix nobel de la paix ? Qui a entendu parler de Arthur Zang, ingénieur camerounais de 24 ans, qui a conçu la première tablette tactile africaine à usage médical : Cardiopad ? L’Afrique ne compte pas que des Nelson Mandela!!! Plusieurs générations de leaders dans tous les domaines se succèdent et j’aimerais dire que nous n’attendons pas toujours la main tendue pour nous réaliser! Plusieurs d’entre nous se tiennent debout et font avancer les choses …mais cela ne sera jamais viral sur youtube parce que cela se passe sur le terrain.
En conclusion, j’aimerais souligner d’une part ma joie de voir la cause de Invisible Children faire autant de bruit, car elle sensibilise les gens aux problèmes et aux conséquences de la guerre. Mais j’aimerais que nous africains réalisions un mouvement viral pour montrer l’Afrique actuelle qui est belle, jeune et entreprenante. Nous ne sommes pas que maladies, guerres et enfants rachitiques. Nous sommes éduqués, de plus en plus politisés et nous avançons dans ce monde à notre rythme certes, mais nous avançons.
Cet article a été rédigé par Vanessa KANGA
Bio de Vanessa : Bouillon de cultures et une femme artiste, africaine et diasporienne.
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