Projecteur sur la chaîne de café Neo le « Starbucks » africain

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L’Afrique est l’un des grands producteurs de café, mais rares sont les Africains qui ont l’habitude de déguster un cappuccino ou un latte. C’est avec ce constat qu’un jeune entrepreneur nigérian a lancé la chaîne Neo, espérant conquérir les grandes villes du continent.
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Comme lui, beaucoup de Nigérians expatriés dans les grands villes occidentales ont découvert et pris goût à l’expresso et ses variantes, servis dans un environnement cosy. Et quand ils rentrent au pays, où l’on boit surtout du thé ou un café soluble importé de mauvaise qualité, ils ne trouvent pas d’endroit pour satisfaire les habitudes prises à l’étranger.

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L’idée de Ngozi Dozie, cofondateur de Neo avec son frère Chijoke, est de conquérir le marché nigérian avant que Starbucks ne s’y intéresse. Le géant américain compte plus de 20.000 cafés dans 65 pays du monde, mais aucun en Afrique subsaharienne.

Neo, qui compte pour l’instant trois cafés à Lagos –où deux autres ouvertures sont prévues début 2015– et un à Kigali, prévoit d’avoir entre 20 et 30 cafés à Lagos d’ici quatre ans, pour ensuite conquérir le reste du continent.

Sur une des grandes artères de Victoria Island, le quartier des affaires de Lagos, des hommes en costume se pressent devant le comptoir du café Neo pour commander leur cappuccino à emporter. Une faune branchée a investi les confortables canapés, armée d’ordinateurs portables, pour « brain-stormer » en sirotant un caffè latte ou un frappuccino, sur fond de jazz.

Cette scène de début de matinée n’aurait rien d’étonnant à New York, Londres ou Paris. Mais il s’agit d’un phénomène nouveau dans la capitale économique nigériane, une mégalopole de quelques 20 millions d’âmes où, jusqu’à récemment, trouver un établissement servant un expresso digne de ce nom relevait du parcours du combattant.

Pourtant « la demande est très importante », souligne Ngozi Dozie.

Ce sont notamment les « repats » ou les « returnees », ces Nigérians qui ont quitté le Nigeria pour étudier et travailler à l’étranger. Ces dernières années, ils sont rentrés par dizaines de milliers au pays, fuyant l’atmosphère économique morose aux Etats-Unis et en Europe, et attirés par les opportunités que leur offre maintenant leur pays d’origine, devenu la première puissance économique d’Afrique.

Le Nigeria, pays le plus peuplé du continent avec près de 170 millions d’habitants, abrite une classe moyenne émergente, multipliée par 6 entre 2000 et 2014, qui représente aujourd’hui 4,1 millions de foyers, selon une récente étude de la banque Standard.

Plusieurs chaînes américaines comme KFC ou Domino’s Pizza, se sont déjà lancées à la conquête du marché nigérian, malgré les coûts fixes astronomiques que cela engendre, dans un pays où les infrastructures sont en piteux état.

Jeune quadragénaire, Ngozi Dozie est lui aussi un « repat » qui a fréquenté de prestigieuses universités à l’étranger. Il s’inspire du modèle indien notamment, où la chaîne locale Cafe Coffee Day, implantée dans le pays depuis près de 20 ans, a largement bouclé le marché, au moment où Starbucks cherche à s’y implanter.

« Nous commençons petit pour le moment et notre but est de croître et de faire en sorte que, si Starbucks vient s’implanter, nous restions le choix des Nigérians, parce nous sommes africains » dit-il.

– Un café cultivé et consommé par les Africains –

Neo ne sert que de l’arabica 100% rwandais, un de ses grands arguments de vente.

« Neo, veut dire nouveau en latin, mais en Tswana, la langue du Botswana, ça veut dire « cadeau », explique M. Dozie.

« Notre approche est de boire, nous, Africains, le café que nous produisons, qui nous a été donné en cadeau, au lieu de l’exporter et d’importer des cafés de qualité inférieure », tel que le café soluble, très répandu en Afrique.

Pour l’instant, les grands producteurs de café africains tels que l’Ethiopie, l’Ouganda, le Rwanda, exportent la grande majorité de leur production brute vers les Etats-Unis et l’Europe.

Au Rwanda, où « le premier caféier a été planté en 1904, ça fait plus d’un siècle qu’on produit du café. Mais on en consomme assez peu » explique Kaitana John Bosco, Rwandais trentenaire passionné de café, embauché par Néo pour former de jeunes serveurs nigérians à l’art du cappuccino.

« J’ai rendu visite en 2007 à un producteur de café. Ce vieil homme cultivait le café depuis 20 ans, mais il n’avait aucune idée du goût que ça avait » raconte-t-il.