Prenez une île… par Therese Son

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prenez une île

Prenez une île. N’importe laquelle. Peuplez la tout en veillant à équilibrer le nombre d’idiots avec le nombre d’individus lambda et le nombre d’individus doués d’une intelligence supérieure. Mélangez bien le tout. Offrez des richesses naturelles à cette île. Vous pouvez y rajouter un peu de richesse culturelle selon votre convenance. Laissez reposer durant deux à trois décennies. Là, vous obtiendrez une petite société dotée d’une culture, de traditions, d’une histoire, d’une économie, de perspectives de développement etc. Plusieurs corps de métiers se distingueront et chacun sera accessible à qui le voudra. Certains se tourneront vers l’agriculture, d’autres vers les arts et d’autres encore vers le monde des affaires. Certains seront leaders, d’autres suiveurs. Les plus jeunes respecteront les plus âgés car plus sages. Chacun aura la possibilité de s’épanouir aussi bien que la terre qui l’a accueilli lui et ses ancêtres. Pour faire bref, votre île connaîtra son âge d’or. Tout dépend néanmoins de la manière dont vous avez précédemment dosé les premiers ingrédients.

Il est donc très important que vous suiviez ces instructions à la lettre, sinon quoi, votre création périclitera ! Son agonie sera telle qu’une grande part de ses habitants la fuiront, certains restants la pourriront de l’intérieur, d’autres venus de l’extérieur se l’approprieront en se gorgeant de ses richesses. Les habitants de votre île se tueront au travail. Non plus pour nourrir leur famille mais pour enrichir indéfiniment un groupe réduit d’illégitimes dirigeants. Ces dirigeants useront de la manipulation afin de persuader les habitants qu’ils sont essentiels à la survie de ces derniers et de leur île. Paradoxalement, vos habitants auront du mal à atteindre leurs objectifs sociétaux. Ils auront du mal à trouver du travail car leurs places auront été offertes aux frères de leurs dirigeants. Désenchantés et sans espoirs, les plus âgés n’auront même plus la force de se faire respecter par les plus jeunes. L’éducation, prônant le respect des anciens, et de la femme, héritage de leurs aïeuls s’appuyant sur leur religion s’écrasera sous le poids du désabusement. Situation antithétique, les enfants enfanteront. Face à ce désarroi les plus jeunes quitteront leur terre ou bien se tourneront vers les petits boulots, la prostitution et les trafics en tout genre. Le trafic sera rendu très fluide grâce aux individus extérieurs qui généreusement ramèneront avec eux drogues et armes. Lorsque les habitants verront qu’ils se sont fait avoir et qu’ils tournent sur eux-mêmes, comme le serpent ils finiront par se mordre la queue. Ainsi lorsqu’ils n’en pourront plus de se tuer dans un travail dont ils ne voient pas les fruits, ils choisiront différents modes de protestation innovants. Ils se dénigreront, se jalouseront, se marcheront les uns sur les autres, s’empêcheront d’avancer et se tueront entre eux ! Non, non, ils n’essaieront pas de comprendre ce qui freine l’avancement de leur terre nourricière ! Comme des lâches ils préfèreront prôner une culture du crime, de la violence, du matérialisme et du m’as-tu-vu ! C’est bien plus simple, bien plus rapide et puis on y gaspille moins d’énergie. Si l’on survit…


Cet article a été rédigé par Thérèsa SON du site asetreh
Bio de Thérèsa : 20 ans, martiniquaise, étudiante en communication des organisations à l’université Vincennes Saint-Denis (Paris 8).
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