Serge Letchimy clashe Claude Guéant à l’Assemblée Nationale

1749

Serge Letchimy, l’héritier de Césaire donne la réplique à Claude Guéant

Lors des questions au gouvernement, Serge Letchimy, député apparenté socialiste de Martinique interpelle vivement le ministre de l’Intérieur sur ses propos sur la “valeur des civilisations”. Il a évoqué la colonisation, l’esclavage et les camps de concentration. Excédé, le gouvernement decide de quitter l’hémicycle. Le fait que les députés quittent l’assemblé rarissime, la dernière fois qu’un tel événement s’est produit au palais Bourbon c’était lors de l’affaire Dreyfus.


La polémique sur les propos de Claude Guéant… par LCP

Claude Guéant exige immédiatement des excuses de la gauche. Selon le Ministre de l’Interieur, d’une part, “Les limites de l’inadmissible ont été dépassées” et d’autre part “Rien ne peut justifier qu’à des propos qui ne visent qu’à rappeler les valeurs principales de la République, on oppose une instrumentalisation de la Shoah”.


Claude Guéant réagit aux propos de Serge Letchimy par LCPPeu après, Christiane Taubira, député PRG de la Guyane réagit au propos de Serge Letchimy et à la réaction du Gouvernement et de sa majorité. “Mr Guéant joue avec le feu depuis longtemps” estime l’ex candidate à la présidentielle.


Christiane Taubira défend le député Serge… par LCP

Sur Twitter les messages affluent, avec par exemple celui de Eric Besson :

Audrey Pulvar qui affirme,en créole, qu’il ne faut pas faiblir dans l’adversité :

ou même Nagui qui appuie les propos de Edwy Plenel :

Alors que le premier ministre demande lui aussi des excuses, Serge Letchimy s’explique au micro de la chaîne parlementaire. ” Nous avons aujourd’hui des dérives extrêmement graves” affirme le député.


Serge Letchimy s’explique. par LCP

Nous avons obtenu le transcript de son texte :

« Nous savions que pour M. Guéant la distance entre immigration et invasion est totalement inexistante et qu’il peut savamment entretenir la confusion entre civilisation et régime politique. Ca n’est pas un dérapage, c’est une constante parfaitement volontaire. En clair, c’est un état d’esprit et c’est presque une croisade. M. Guéant vous déclarez du fond de votre abîme, sans remord ni regret, que toutes les civilisations ne se valent pas. Que certaines seraient plus avancées voire supérieures. »

« Non M. Guéant, ce n’est pas « du bon sens », c’est simplement une injure qui est faite à l’Homme. C’est une négation de la richesse des aventures humaines. C’est un attentat contre le concert des peuples, des cultures et des civilisations. Aucune civilisation ne détient l’apanage des ténèbres ou de l’auguste éclat. Aucun peuple n’a le monopole de la beauté, de la science du progrès ou de l’intelligence. Montaigne disait « chaque homme porte la forme entière d’une humaine condition ». J’y souscris. Mais vous, monsieur Guéant, vous privilégiez l’ombre. »

« Vous nous ramenez, jour après jour, à des idéologies européennes qui ont donné naissance aux camps de concentration au bout du long chapelet esclavagiste et colonial. Le régime nazi, si soucieux de purification, était-ce une civilisation ? La barbarie de l’esclavage et de la colonisation, était-ce une mission civilisatrice ? »

« Il existe, M. le premier ministre, une France obscure qui cultive la nostalgie de cette époque, que vous tentez de récupérer sur les terres du FN [À ce moment-là, François Fillon se lève et part, suivi du gouvernement]. C’est un jeu dangereux et démagogique qui est inacceptable. Il existe une autre [France], celle de Montaigne, de Condorcet, de Voltaire, de Césaire ou d’autres encore. Une France qui nous invite à la reconnaissance, que chaque homme… » [M. Letchimy est alors coupé par le président de l’Assemblée, Bernard Accoyer].

Peu après l’incident, le premier ministre a demandé dans un communiqué aux responsables de l’opposition de condamner « une provocation indécente ».

Edit de la rédaction : Le parcours de Serge Letchimy 

  • en 2001, Serge Letchimy est élu maire de Fort-de-France, succédant à Aimé Césaire, qui occupait le fauteuil depuis 1945 ;
  • en 2005, il devient président du Parti progressiste martiniquais, fondé par Aimé Césaire ;
  • en 2007, il est élu député, apparenté socialiste ;
  • en 2010, sa liste l’emporte aux régionales, et il devient président du conseil régional.